Madame, cette histoire est vraie.
J’ose la raconter : À mon âge
On peut s’affranchir d’être sage
En ne risquant aucune plaie.
J’avais vingt ans, j’étais soldat
Un soir de perme en ville
Allai, petit, au plus facile.
On m’avait dit : La rue des chats
Est celle d’Armelle, une affaire.
J’avais vingt francs c’était le prix
Convenu pour le paradis.
Mais hélas ce fut un enfer :
Armelle fit tous les efforts
Pour faire tourner le moteur
Mais rien n’y fit : Aucune ardeur
Ne parvint à monter le corps.
Au bout d’un moment, la jolie
Me suggéra de revenir
Un jour de gloire, pour finir,
Et, tout confus, je dis merci.
Puis elle dit : « Prends tes vingt francs,
Je ne pourrais pas les garder :
Tu vois, j’ai de l’honnêteté,
N’ai jamais volé, tu m’entends ? »
Madame, comment expliquer :
J’eus honte, et me sentis tout bête
En reboutonnant ma braguette.
Et, comme pour me consoler,
Elle me dit : « Combien de ceux,
Qui président, qui député
Sauraient ainsi nous rembourser ?
Pas un seul, car tous sont véreux. »
Souvent encor’ je pense à elle.
Avec ses yeux de tentation
Elle m’apprit l’absolution
Malgré ma carence mortelle,
Et je me dis, dans l’isoloir
Que je fais un gros chèque en blanc.
Armelle fût bon président
Fussé-je seul à le savoir.
©m.kissine
(avis de naissance : te semper amabo - ISBN 9782919390038 -
http://m.kissine.free.fr/)